Lettre de Pierre Bonnefond aux membres du Rayon de Saint-Mandé

Jean LASNIER - 1936
Jean LASNIER – 1936

Chers Amis et chères Amies, c’est avec beaucoup de tristesse que nous devons, aujourd’hui, vous faire part du décès de notre cher abbé Jean Lasnier. Cela est survenu le 11 décembre 2007, à Paris, boulevard Raspail, en la maison Marie-Thérèse, retraite des anciens prêtres du diocèse de Paris, où il s’était retiré il y a sept ans et où il passait une retraite bien méritée.

C’est aussi avec beaucoup d’ émotion que plusieurs d’entre nous ont assisté à la sobre et belle cérémonie religieuse. Elle fut célébrée le lundi 17 décembre 2007, en la chapelle de la maison Marie-Thérèse. Une gerbe de fleurs, au nom des Anciens du Rayon et de la Lorraine, rappelait son passage, inoubliable, parmi nous.
P.B. Janvier 2008

Faut-il rappeler, ici et maintenant, que Jean Lasnier naquit, en 1913 dans une famille saint-mandéenne de six enfants (3 garçons et 3 filles). Le père de Jean était médecin apprécié de sa clientèle et particulièrement dévoué auprès des plus démunis. Jean était l’un des plus anciens du Rayon. Il y a apporté son dynamisme, sa droiture, son immense connaissance de la nature humaine et l’amour de son prochain. Jeune, il fut un moment attiré par la prêtrise. Mais son frère, Jacques, ayant décidé d’entrer au séminaire, il abandonna cette voie et choisit de devenir enseignant. Désormais, ce sont les sciences physiques qu’il professa.

Jean participa activement aux côtés de P.G. à l’épanouissement, dans les années trente, de la génération Blainville dont tous les témoins encore de ce monde ont gardé un impérissable souvenir. Mobilisé, comme tous ceux de sa génération, à la déclaration de la Seconde guerre mondiale, il fut fait prisonnier et retrouva son frère Jacques, séminariste, dans le même camp, en Allemagne. Durant toute sa captivité, il se dévoua sans compter pour ses camarades. Il accepta d’accomplir, pour leur rendre service, les tâches les plus humbles et les plus ingrates, sans jamais se départir de sa bonne humeur. Ce fut un exemple pour tous.

Plus tard, rendu à la vie civile en 1945, son frère Jacques ne survécut pas aux séquelles des privations endurées en captivité. Jean ressentit alors qu’il devait prendre sa place et c’est ainsi qu’il entra, en 1946, au séminaire des  Vocations Tardives. Ensuite, il fut ordonné prêtre le 29 juin 1951, jour de la fête des saints Pierre et Paul. Une vocation tardive qui allait durer quelque cinquante-six ans !

Durant cette période de séminaire, Jean avait repris, tout naturellement, sa place au Rayon. Ainsi, il fut le grand frère directeur et animateur de camps et de colonies de vacances. Aussi, et surtout, il se révéla un conseiller et un exemple pour la génération de La-Ferté-Macé. Cela sous la bienveillante autorité de P.G. qui avait pris la relève et maintenu l’esprit du Rayon pendant les années d’occupation.

Nommé en paroisse, l’abbé Lasnier exerça son ministère d’abord à Saint-Eloi, rue de Reuilly, dans le douzième arrondissement de Paris. Il y resta de nombreuses années, puis il fut nommé à la paroisse de Saint-Germain-des-Prés. Finalement, c’est en cette paroisse qu’il termina son sacerdoce. Il prit, il y a sept ans, sa retraite en la maison Marie-Thérèse.

Lors de son ministère à Saint-Eloi, dans les années cinquante, Jean Lasnier fit le rapprochement entre les jeunes de l’Espérance-de-Reuilly et ceux du Rayon et de la Lorraine. C’est ainsi que plusieurs jeunes de Reuilly furent, en 1952, accueillis à Toulvern. L’abbé Lasnier a laissé, à Saint-Eloi, un souvenir inoubliable. Il visita, en effet, tous les habitants de sa paroisse sans aucune exception, croyants de toutes religions ou incroyants. Personne ne lui était indifférent, tous étaient son prochain. Il connaissait ou reconnaissait, individuellement, tous ceux et toutes celles qu’il avait visités. On lui avait donné le sympathique et amical surnom  » d’Abbé des escaliers « .

Néanmoins, il ne faut pas oublier cet autre trait de son caractère : maitriser son corps par une stricte discipline. Par exemple, sa douche froide matinale ou ses plongeons dans les lacs glacés, lors des camps et des colonies de vacances ! Chaque jour, c’était aussi le nageur de la première heure, le plus souvent seul, dans la piscine du marché Saint- Germain quand il était vicaire à Saint-Germain-des-Prés.

Jean Lasnier n’a jamais oublié son cher Rayon. Fidèle, il participa à toutes nos réunions annuelles d’Anciens tant que ses moyens physiques le lui permirent. Ainsi, quand il fut dans l’impossibilité de se déplacer, il nous donna toujours de ses nouvelles. En novembre 2005: « J’attends la fin de ma vie terrestre à la maison Marie-Thérèse où je suis très bien traité. Union de pensée avec vous les Anciens du Rayon. »

En novembre 2006, c’est par l’intermédiaire de son ami, l’abbé Roger Jau, que nous sûmes que Jean ne peut plus pratiquement ni lire, ni écrire, ni marcher et que malgré son handicap. Jean a un tempérament fort et bon moral, accompagné parfois de sympathiques pointes d’humour. « 
Enfin, le 11 décembre 2007, c’est-à-dire le jour même du décès de Jean, le même abbé Roger Jau nous transmettait cette lettre :

Chers Amis,

Il y a quinze jours le père Jean Lasnier m’a dicté un petit mot de vœux et d’amitié pour Noël, pour ceux qui lui ont écrit ces derniers mois.
L’état de santé de Jean s’est subitement aggravé. Avec son assentiment, je lui est donné le sacrement des malades. Il a été très bien soigné et a connu quelques jours de répit pendant lesquels il m ’a confirmé son désir de voir partir cette lettre. Aujourd’hui Jean nous a quitté pour la Maison du Père. Je respecte sa volonté, c est un message de paix et d’amitié qu’il vous adresse. Je m’ y associe.

Voici donc la dernière lettre de notre cher abbé Jean Lasnier:

Chers Amis,
Je suis très touché de toutes les lettres d’amitié que j’ai reçues. Ne pouvant vous répondre personnellement, j’ai demandé à mon ami Roger de le faire à ma place.
Je vous remercie donc et vous présente à l’occasion de Noël mes « Meilleurs vœux » pour vous et pour tous ceux qui vous sont chers.
Je ne pense plus rien faire, mais je peux encore prier à toutes vos intentions.
Amicalement.

Père Jean Lasnier